[EDITO] FORCER LE CHEVAL À BOIRE ?

[EDITO] FORCER LE CHEVAL À BOIRE ?

Voici une déclaration de Monsieur Rudi Vervoort, Ministre-Président de la Région de Bruxelles-Capitale(1), qui assurément fera mouche. Interrogé sur le nombre « préoccupant » de Bruxellois toujours réfractaires à la vaccination – qui n’est PAS obligatoire, rappelons-le bien pour nous en souvenir – et alors que le journaliste lui tendait une perche à peine tendancieuse, Monsieur Vervoort n’a pas hésité à la saisir, pour affirmer qu’à un moment, lorsqu’on a suffisamment patienté au bord de la rivière, il faut bien « forcer le cheval à boire ».

Forcer le cheval à boire ???

Cette image bien connue des pratiquants du bouddhisme, où le cheval est d’ailleurs assez souvent remplacé par une vache, sans que le message s’en trouve terni, illustre le fait que dans une vie spirituelle authentique, aucun passage ne peut être forcé, que l’éveil est une affaire de cheminement personnel, que tout vient à son heure, au bon moment, pour qui sait faire preuve de patience et de persévérance. Et que justement, on peut mener le cheval (ou la vache) à la rivière, lui montrer l’eau, voire lui expliquer en détail les vertus de l’eau, mais boire à sa place, non, vraiment, ce n’est pas possible. Le forcer à boire, encore moins. L’éveil spirituel est une affaire d’expérience, de décision, de vécu, de liberté, de joie, comme lorsqu’on trouve sur son chemin une eau qui désaltère après une longue marche au désert. Monsieur Vervoort n’a manifestement rien compris au message bouddhique. Mais bon. Il n’a sans doute que faire des chemins spirituels.

La non-vaccinée que je suis s’estime particulièrement honorée d’être ainsi mise au rang des animaux – des êtres vivants qui savent ce que vivre veut dire et qui respectent infiniment leur habitat et toutes les autres espèces vivantes, au contraire des humains – mais je m’interroge sur la possible (probable) ignorance de Monsieur Vervoort en matière de bien-être animal, que des lois de ce pays reconnaissent, garantissent et protègent, en punissant les éventuels contrevenants. Je voudrais avertir Monsieur Vervoort que ses propos le placent à la limite du délit et qu’il devrait prendre connaissance de la loi.

Par ailleurs, j’aimerais demander à Monsieur Vervoort comment il compte s’y prendre exactement pour « forcer le cheval à boire ».

Va-t-il me placer un entonnoir dans la bouche ? Va-t-il me tirer ou me pousser à coups de cravache jusqu’au milieu de la rivière et me maintenir la tête sous l’eau ? Va-t-il m’y noyer ? Ou choisira-t-il plutôt de me ligoter à un arbre et de me placer un écarteur entre les mâchoires ?  Va-t-il utiliser un arrosoir ? Ou une seringue (outil fashion) ? Une cruche, peut-être ? Envisage-t-il de m’administrer une « dose » (mot terriblement branché) d’anesthésiant puissant pour pouvoir tranquillement procéder à son œuvre de forçage ?

Oups ! Me vient tout à coup une affreuse objection. Peut-être que Monsieur Vervoort ne pourra PAS me forcer à boire, puisque je porte un masque ?

Parce qu’à Bruxelles, le masque reste tout de même obligatoire partout, il ne faudrait pas l’oublier. Cela va peut-être me sauver la vie ? A moins qu’il ne mijote d’y faire un petit trou ? (mine de rien, juste le temps de bien me forcer) Ou un gros trou ? Mais alors ça va se voir. Et le masque deviendra encore plus inutile… Aïe, aïe, aïe. Quel dilemme !

Monsieur Vervoort ferait bien de réfléchir à deux fois avant de faire des déclarations publiques où l’on ne sait ce qui l’emporte de l’indignité ou de la bêtise. Comparer, sans vergogne, l’obligation vaccinale à une pratique de torture sur animaux montre assez dans quelle dangereuse dérive nous ont entraînés nos gouvernants. De fait, songer à obliger les citoyens à se faire vacciner contre leur gré relève, non seulement d’une illégalité avérée mais aussi de la maltraitance. Je suis une citoyenne et j’ai des droits. Ces droits sont garantis par la Constitution. Ne pas les respecter est une infraction. Et la pratique de la torture est un crime.

Monsieur Vervoort, je ne suis pas un cheval que l’on force à boire. Je ne suis pas une oie que l’on gave. Je suis une citoyenne, adulte, responsable, libre, très déterminée à faire valoir ses droits.

Encore une question : à Bruxelles, les chevaux doivent-ils également porter le masque ?

Corine Dehaes