Les effets négatifs des éoliennes ne peuvent rivaliser avec les dangers immenses que recèle surtout le nucléaire . Néanmoins, quand elles sont de grande taille et que leur nombre explose, comme c’est le cas ces dernières années, les destructions et consommations qu’elles entraînent sont massives. Une partie de ces destructions peut être considérablement limitée, par des moyens simples, qu’il est plus que temps de généraliser. Mais en même temps, il est essentiel que le recours à ces moyens ne devienne pas un argument pour poursuivre le surdéveloppement de l’éolien. En effet, toute une partie de ses effets nocifs sont inévitables et graves, en cas de grand nombre des installations concernées. Ce qui montre, une fois de plus, qu’aucune solution technologique ne permet de faire l’économie de cette urgence brûlante : l’arrêt du productivisme.
Des moyens efficaces
Commençons par les informations encourageantes : les moyens de limitation des dégâts évoqués.
Comme cela devient toujours plus manifeste, les éoliennes tuent un très grand nombre d’oiseaux, de chauve-souris, et même d’insectes. Concernant les premiers, beaucoup de dispositifs pour diminuer les destructions sont inefficaces[1], mais, selon une étude de 2020, une démarche permet de réduire de 70% le nombre d’oiseaux tués par les éoliennes : peindre en noir une de leurs pales, ce qui augmente la visibilité des engins.[2]
Au sujet des chauves-souris, là aussi, certaines mesures sont efficaces, comme on le lit dans Reporterre : « La nuit par vent faible, ces chiroptères sillonnent le ciel pour se nourrir. Une période particulièrement meurtrière pour les animaux si les éoliennes tournent, mais en revanche peu productive pour les exploitants. L’Agence de la transition écologique (Ademe) encourage ainsi les parcs à arrêter leurs éoliennes lors de ce type d’épisodes météo, sachant que le manque à gagner est faible selon les calculs de l’agence.[3] »
Pour la faune aérienne en général, le choix de l’emplacement des éoliennes est très important également.[4]
Des chiffres titanesques
Pour prendre conscience de la nécessité d’appliquer au plus vite ces mesures, il suffit de considérer les chiffres relatifs à l’éolien : il y a à présent près de 1 780 éoliennes en Belgique[5], près de 10 000 en France[6], ou encore près de 30 000 en Allemagne[7]. Et comme on peut aisément l’observer, une grande partie de ces installations sont de très grande taille.
Or, selon une étude prise très au sérieux, une éolienne tue en moyenne 7 oiseaux par an.[8] Pour mesurer l’ampleur de ces destructions, il suffit de multiplier par les chiffres donnés ci-dessus (même s’il y a de quoi se rendre malade, quand on songe aux résultats de ces calculs). Les destructions en question sont d’autant plus graves du fait que les victimes sont notamment des espèces menacées, comme les grands rapaces.[9]
Concernant les chauves-souris, une analyse gouvernementale, réalisée au Canada en 2017, et se basant sur une série d’études, présente des estimations allant jusqu’à plusieurs centaines de milliers d’animaux tués annuellement, en Amérique du Nord.[10]
Et comme mentionné, les insectes, déjà si fortement touchés par les pesticides et les ondes électromagnétiques (et formant une base fondamentale des écosystèmes), ne sont pas non plus épargnés.[11]
Comme évoqué, ces données font apparaître de manière criante l’importance d’une application des mesures évoquées, pour réduire ces dégâts. Mais les données en question mettent aussi en évidence le fait que ces mesures ne permettraient qu’une réduction, pas un arrêt des dégâts (ce qui va ressortir encore bien plus clairement, dans la dernière partie de cet article) ; d’où le fait qu’il s’agit très certainement de s’opposer à une continuation de la multiplication des installations concernées (tout comme il s’agit très certainement de s’opposer à une poursuite du nucléaire, ou encore à l’invasion des champs et prairies par les capteurs solaires). Car, faut-il le rappeler, sortir du productivisme n’est en rien une utopie ; une démarche comme un redéveloppement maximal de l’agriculture paysanne, en particulier, permettrait une baisse colossale des besoins en énergie et en autres ressources.[12] Et utilisés avec modération, les différents moyens évoqués (à l’exclusion du nucléaire, très certainement) pourraient chacun contribuer, sans trop de dégâts, à la satisfaction des besoins énergétiques.
Éolien et extractivisme
Pour compléter ces informations, il est essentiel d’aborder, également, d’autres impacts encore liés à l’énergie éolienne, en particulier en matière d’extractivisme. Prenons les installations prévues pour un grand projet actuel, le parc éolien maritime de Dieppe le Tréport (la liste qui suit n’inclut qu’une partie des matériaux qui interviennent). Les données suivantes concernent chaque éolienne individuellement : le rotor (partie rotative) et la nacelle (support du rotor et contenant du multiplicateur et du générateur) pèseront, ensemble, 575 tonnes ; le mât, métallique, 550 tonnes ; la longueur des câbles électriques, là aussi pour chacune des éoliennes, sera d’environ 12,4 km, pour un poids total de cuivre d’environ 6 400 kg ; le poids total des isolants plastiques et des blindages électromagnétiques sera d’environ 3 850 kg ; concernant les terres rares, ces éoliennes contiendront chacune 330 kg de Neodym et 100 kg de dysprosium.[13]
Concernant l’éolien terrestre, il faut préciser aussi la quantité de béton nécessaire au socle : un millier de tonnes environ, par installation d’éolienne de grande taille[14], avec ce que cela implique comme destruction de terres cultivables et, là aussi, comme extractions en amont.
Tout cela donne une idée assez claire de l’extractivisme évoqué. Surtout, là aussi, quand on multiplie ces chiffres par les nombres d’installations cités plus haut.
Comme évoqué, tout cela nous montre, une fois de plus, à quel point il est essentiel de sortir au plus tôt de la folie productiviste, et de se tourner vers les vraies alternatives. Tout en s’efforçant, entretemps, de limiter les ravages liés à la folie en question, par des moyens comme ceux abordés ici.
Une large partie du développement industriel se poursuivra sûrement, sans qu’on n’ait grand-chose comme prise sur lui. Mais cela ne doit pas nous empêcher de construire, parallèlement, les alternatives évoquées, pour sauver un maximum de ce qui peut encore l’être.
Daniel Zink, éco-conseiller
[1] https://reporterre.net/Eoliennes-Comment-eviter-la-mort-des-oiseaux
[2] https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ece3.6592
[3] https://reporterre.net/Eoliennes-Comment-eviter-la-mort-des-oiseaux
[4] Ibid.
[5] https://www.renouvelle.be/fr/faits-chiffres/observatoire-eolien/
[6] https://transition-energetique.eco/combien-eolienne-france/
[7] https://www.wind-energie.de/themen/zahlen-und-fakten/deutschland/
[8] https://www.lpo.fr/la-lpo-en-actions/developpement-durable/energie/eolien/impact-sur-la-biodiversite ; Notons que dans le très qualitatif média Reporterre (géré par l’ancien responsable des pages environnement du journal Le Monde, Hervé Kempf), cette étude est signalée comme étant une référence (https://reporterre.net/Eoliennes-Comment-eviter-la-mort-des-oiseaux)
[9] https://www.radiofrance.fr/franceinter/partiellement-peintes-en-noir-les-eoliennes-tueraient-moins-d-oiseaux-2808600
[10] https://mffp.gouv.qc.ca/documents/faune/rapport_chauves-souris_eolien_2017.pdf
[11] https://environnementdurable.org/les-ravages-de-lindustrie-eolienne-sur-les-animaux/
[12] https://grappebelgique.org/2023/12/05/des-gestes-pour-pacifier-et-transformer/
[13] https://cpdp.debatpublic.fr/cpdp-eolienmer-pdlt/quelles-sont-caracteristiques-techniques-eoliennes-envisagees.html
[14] https://www.infociments.fr/genie-civil/le-beton-dans-lair-du-temps